La Belle et la Bête, une histoire éternelle prête à vous enchanter

Le 21 octobre 1992, la version animée de La Belle et la Bête sort pour la première fois sur les grands écrans français. Les studios Disney vivaient alors leur Troisième Âge d’or et de nombreuses familles allaient être bercées par ce film mémorable, réalisé par le duo mythique de Gary Trousdale et Kirk Wise. L’histoire résolument romantique, les personnages attachants et les chansons inoubliables étaient sur le point de conquérir le coeur du public dans le monde entier.

Avance rapide. Le 22 mars 2017 sort l’adaptation live de ce Chef d’Oeuvre d’animation, réalisé par Bill Condon. Pile pendant un nouvel âge d’or pour le Studio. Le risque était grand : comment rester fidèle à l’original en approfondissant le scénario ? Comment dépoussiérer cette histoire qui était déjà intemporelle à l’époque ? Disons le tout de suite : cette adaptation est la digne héritière du long-métrage d’origine. Mieux encore : elle le surpasse pour devenir la quintessence d’un genre tout entier.

La recette parfaite pour un remake respectueux

« La Belle et la Bête » a toujours eu une place spéciale dans le coeur du public, peut-être même plus encore dans celui des français. Cette oeuvre a bercé l’imagination de toute une génération, qui se l’est totalement approprié. L’annonce de ce remake a ainsi été reçue avec scepticisme et crainte, voir même avec défiance. Pour Bill Condon, « La Belle et la Bête est le film le plus difficile » qu’il ait eu à réaliser. On ne peut que comprendre la pression et la difficulté de la tâche face à la reprise d’une figure de la pop culture.

Il existe deux catégories de remake Disney en live-action actuellement : les films qui s’affranchissent de leur modèle pour proposer une nouvelle version (Alice aux Pays des Merveilles et sa suite, Maléfique et Le Livre de la Jungle) et ceux, encore minoritaires, qui reproduisent fidèlement l’oeuvre originale (Cendrillon). A notre grande satisfaction, « La Belle et la Bête » version 2017 fait partie de cette dernière catégorie. Elle évite ainsi les errances mécaniques de Maléfique et des films Alice pour se concentrer sur le coeur et le fond du propos. Les codes visuels sont respectés, les décors rappellent l’original tandis que les personnages sont fidèles et approfondis. Le film évite l’écueil de la nostalgie et se concentre sur la modernisation de ce chef-d’oeuvre.

Des personnages approfondis qui subliment l’oeuvre

Stephen Chbosky et Evan Spiliotopoulos, scénaristes du film, ont cherché avant tout à enrichir le scénario. Au coeur du film, ce sont les personnages qui bénéficient d’un traitement de faveur. Tous, sans exception, gagnent en profondeur, en complexité et en réalisme.

La psyché de Gaston (interprété par Luke Evans) gagne également en intensité. Son rapport à la guerre, son traumatisme, même s’ils ne sont pas mis en lumière en tant que tel, permettent d’explorer le personnage et de mieux comprendre son fonctionnement, son besoin d’écraser les autres. Il a un besoin farouche de vaincre et de dominer son adversaire pour se sentir en vie. Il est en bataille avec lui-même mais il ne s’en rend compte à aucun moment tant il est protégé par son acolyte Le Fou (Josh Gad, inoubliable voix originale d’Olaf).
La relation de ce duo est faite de haine et d’amour, toujours à la limite de la rupture. Le Fou voit en Gaston la figure masculine parfaite. Il est un modèle pour lui, qu’il veut suivre, mais il en voit également les limites. La séquence musicale de la chanson de Gaston est ainsi limpide : c’est grâce à Le Fou que Gaston est apprécié des villageois. En réalité, c’est lui qui mène la danse et qui contribue à sa popularité. Le duo comique apparaît bien plus complexe qu’il ne l’est au premier abord et il s’agit sans conteste de l’une des plus grandes réussites du film.

Belle gagne également en consistance, bien que plus légèrement que les autres personnages. Emma Watson est taillée pour le rôle. Elle qui parle parfaitement français et qui est née à Paris, est l’incarnation parfaite de la pétillante princesse Disney. Son interprétation est toujours juste, fine et subtile. Nous ne pensons pas qu’il aurait été possible de trouver meilleure actrice pour le personnage, tant elle en représente les valeurs à l’écran et dans la réalité. Emma Watson s’est profondément impliquée dans l’écriture de cette nouvelle version du personnage pour lui apporter un peu de nuance et une palette de sentiments plus vastes. On s’attachera encore plus à elle qu’à la Belle originale.

La Bête (Dan Stevens) bénéficie également d’un autre traitement. En 1991, l’enchanteresse jette le sort sur lui et sur les habitants du château car il était égoïste mais en 2017, c’est son arrogance qui lui apporte la malédiction. La Bête est traitée avec plus d’esprit dans cet opus qu’elle ne l’avait été. Elle maîtrise mieux ses colères, paraît moins menaçante avec un sens de l’humour presque anglais. Pour la Bête tout comme pour Belle, le passé du personnage est mis en avant et permet de mieux cerner son caractère.

Lumière, Big Ben, Miss Samovar, Zip et tous les autres possèdent leur propre histoire et leur propre passé. L’écriture s’est ainsi affinée pour devenir plus riche que la version animée du film. C’est un réel plaisir de (re)découvrir ces personnages qui subliment cette nouvelle itération du conte, porté sur les écrans pour la première fois en 1946 par Jean Cocteau.

Un remake digne des musicals de Broadway

Si les personnages ont été modernisés et approfondis, les chansons du film ont été conservées dans leur intégralité, à l’exception d’Être Humain à Nouveau présent dans la version longue. Impossible en effet de se séparer de ces séquences qui ont marqué les esprits à l’époque. Alan Menken est ainsi de retour et a pris en main la direction musicale du film, tandis que Tim Rice en a écrit les paroles.
Deux nouveaux titres viennent ponctuer le film et ajouter la touche d’originalité nécessaire : Je Rêve d’une Histoire Sans Fin résonne comme un écho à la chanson phare Histoire Eternelle (« Je rêve d’un moment qui ne finit pas. Je rêve d’une histoire sans fin » /  « Histoire éternelle, qu’on ne croit jamais. De deux inconnus, qu’un geste imprévu, rapproche en secret. ») tandis qu’Ensemble à Jamais permet enfin à la Bête d’entonner la chansonnette, dans un titre plein de mélancolie et de désespoir. Malgré leurs qualités, ces deux nouvelles chansons ne sont pas tout à fait au niveau du reste du film. Il est vrai que le niveau était très élevé, tant les paroles que le regretté Howard Ashman avaient écrites à l’époque étaient pleine de sens, d’amour et de passion.
Une petite note personnelle au passage : nous ne pouvons nous empêcher d’y voir un message caché dans les paroles du titre Je Rêve d’une Histoire Sans Fin, comme des mots directement adressés à Howard Ashman. Cette balade, très nostalgique, nous parle de moments précieux et rares, auxquels il faut s’accrocher (« Et je rêve d’arrêter le temps. »)

Pour les besoins du film, les chansons ont toutes été réorchestrées et s’approchent encore davantage d’une production de Broadway. Le film embrasse allègrement son statut de comédie musicale pour le plaisir des spectateurs. La formule fait mouche, et comme il y a 26 ans, les mélodies restent en tête et marquent les esprits. Une histoire éternelle, réellement.

Alors, on recommande La Belle et la Bête (2017) ?

Oui, nous le recommandons chaudement et aucun fans digne de ce nom ne devrait le rater. Le remake pouvait clairement être accueilli avec méfiance et angoisse, mais Disney a été très respectueux du matériel original et ne l’a trahi à aucun moment. Il s’en inspire, l’approfondit et finit par s’émanciper pour proposer une variante plus aboutie qui arrive à nous enchanter encore une fois. Bill Condon maîtrise le sujet et a su habilement comprendre l’oeuvre originale, tandis que les acteurs se surpassent. Emma Watson, qui s’est profondément impliquée dans le personnage, est parfaite dans son rôle. Elle incarne Belle comme aucune autre actrice n’aurait pu le faire. Aucun des acteurs ne démérite, et la relecture du duo Gaston / Le Fou est un des autres tours de force du film. Décidément, il n’y a presque rien à jeter. Allez le voir, vous ne le regretterez pas, on vous l’assure !

On a aimé

  • La sincérité de l’adaptation, le respect absolu de l’oeuvre originale.

  • Le scénario plus approfondi et les personnages qui ont gagné en intensité.

  • L’esthétisme du film : la palette de couleurs, les décors, les costumes, les effets spéciaux.

  • Une bande originale qui fait mouche encore une fois.

On n’a pas aimé

  • Les deux nouvelles chansons (mais c’est pour chipoter, elles sont très appréciables quand même).